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Eléments de contentieux de l'entreprise
1 octobre 2019

CONTENTIEUX DU TRAVAIL : Notion de faute et Faits tirés de la vie privée, une frontière ténue.

Cour de cassation       chambre sociale          28 septembre 2016                N° de pourvoi: 15-17542 

Sur le moyen unique : 

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 juin 2014), qu'engagé le 26 mai 2008 par la société Sandorgel en qualité de représentant de commerce, M. X... a été mis à pied à titre conservatoire le 11 mai 2011 puis licencié pour faute grave par lettre du 1er juin 2011 ; 

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes au titre du licenciement, alors, selon le moyen, que ne constitue pas une faute grave l'envoi isolé, par un salarié, de messages à l'un de ses collègues se rapportant à un différend de nature non professionnelle ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que deux des messages adressés par le salarié à son collègue l'avaient été sur le téléphone professionnel de ce dernier, quand il résultait de ses propres constatations que lesdits messages avaient trait au remboursement d'une dette à caractère strictement privé, dépourvue de lien direct avec la relation professionnelle des deux intéressés, la cour d'appel a violé les articles 1232-6 et 1235-1 du code du travail ; 

Mais attendu qu'ayant constaté que plusieurs messages de menaces et d'injures avaient été adressés par le salarié à son collègue sur son téléphone portable professionnel pendant son temps de travail, qu'ils concernaient un remboursement d'une somme d'argent qui aurait été prêtée à l'occasion d'un événement professionnel organisé par l'employeur et avaient eu pour effet de perturber leur destinataire dans son travail, la cour d'appel a pu décider que ces faits, qui affectaient l'obligation de l'employeur d'assurer la sécurité des salariés, se rattachaient à la vie de l'entreprise et justifiaient le licenciement pour faute grave de leur auteur ; que le moyen n'est pas fondé ; 

...
PAR CES MOTIFS : 

REJETTE le pourvoi ;

 

Conseil d'État.       10 juillet 2019.        4ème - 1ère chambres réunies

N° 408644    Mentionné dans les tables du recueil Lebon 


Vu : 
- le code du travail ;
- la loi n°2000-312 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative ;


Considérant ce qui suit :


4. … aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail : " Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ". 

5. Il ressort des pièces du dossier que l'inspecteur du travail a refusé d'accorder l'autorisation sollicitée en raison de ce que, les faits reprochés à M. A...étant parvenus à la connaissance de l'employeur le 15 novembre 2010, ils étaient, par suite, prescrits lorsque la procédure de licenciement a été engagée, le 12 juillet 2011. Pour estimer ce motif illégal et, par suite, retirer sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique de la mission locale de la Haute-Garonne et annuler la décision de l'inspecteur du travail, le ministre du travail s'est fondé sur ce que, si le délai de prescription avait effectivement couru dès le 15 novembre 2010, des poursuites pénales à raison des mêmes faits avaient été engagées contre M. A...le 21 décembre 2010, interrompant ainsi le délai de prescription.

6. Contrairement à ce que soutient M.A..., la circonstance que l'engagement des poursuites pénales ne résultait pas d'une plainte de son employeur est sans incidence sur le fait que leur engagement a interrompu, y compris à l'égard de celui-ci, le délai de deux mois prévu par les dispositions, citées ci-dessus, de l'article L. 1332-4 du code du travail.

7. La décision de l'inspecteur du travail étant ainsi entachée d'illégalité, M. A... n'est fondé à demander l'annulation, ni du retrait de la décision implicite par laquelle le ministre a rejeté le recours hiérarchique dirigé contre cette décision, ni de l'annulation, par le ministre, de cette même décision. 

Sur la décision du ministre en tant qu'elle autorise le licenciement de M. A... : 

En ce qui concerne le motif du licenciement :

8. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives ou de fonctions de conseiller prud'homme, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi. Un agissement du salarié intervenu en-dehors de l'exécution de son contrat de travail ne peut motiver un licenciement pour faute, sauf s'il traduit la méconnaissance par l'intéressé d'une obligation découlant de ce contrat.

9. A ce dernier titre, le fait pour un salarié d'utiliser les outils informatiques mis à sa disposition par l'employeur pour s'introduire dans la messagerie professionnelle d'un autre salarié sans l'accord de celui-ci et y détourner de la correspondance ayant explicitement un caractère personnel doit être regardé comme une méconnaissance de l'obligation de loyauté découlant du contrat de travail, alors même que ces faits seraient commis, en dehors des heures de travail, alors que le salarié n'est pas sur son lieu de travail.

10. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. A...s'est introduit dans la messagerie professionnelle d'une autre salariée de l'entreprise, en vue de lire la correspondance échangée par celle-ci avec le directeur de la mission locale et a, en particulier, accédé aux messages qu'elle avait classés dans un dossier expressément identifié comme ayant un caractère personnel. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. A...n'est pas fondé à soutenir que les faits en question ne constituaient pas une violation des obligations découlant de son contrat de travail, susceptible de faire l'objet d'une sanction disciplinaire.

11. Par ailleurs, M. A...n'est pas non plus fondé à soutenir que ces faits, au demeurant commis par un salarié exerçant des fonctions d'encadrement, ne revêtent pas un caractère de gravité de nature à justifier son licenciement.  

…14. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de licencier M. A... serait en lien avec l'exercice de ses mandats. 

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête. 



D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de M. A...et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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